Etape d’Yverdon-les-Bains (9 au 11 octobre)
J’ai à peine commencé le trajet Mathod-Yverdon que je suis déjà arrêtée pour boire le café avec le propriétaire de la brocante ; j’adore les brocantes et je quitte celle-ci après une discussion intéressante et propriétaire de 11 gobelets en étain pour la Sainte Cène. Cela tombe bien puisque le Conseil Synodal a recommandé de renoncer momentanément à faire circuler la coupe pour éviter la contamination de la fameuse grippe. Avec cette nouvelle acquisition, j’ai 17 gobelets, et le brocanteur, sachant pourquoi je vais les utiliser, m’a fait un prix spécial.
En cours de route, je rencontre Chantal et Edith, qui voient les oreilles de Speedy se pointer derrière la petite colline que nous montons. Chantal fait le reste du trajet avec nous.
On arrive tardivement à Yverdon, des gens sont déjà venu pour nous rencontrer, où sont l’âne et la pasteure ?
Mais j’arrive (presque ! voir sous « Lavigny »…) toujours à l’heure pour l’office du soir de 19.30. Grâce à Jean-Claude et Bernard (du groupe de soutien) et M. Jaton (conseil de paroisse) le tipi est monté.
Yverdon reste dans ma mémoire comme une étape de chouette collaboration avec la paroisse et Robert, le pasteur du lieu. Nous sommes plantés à côté du temple de Fontenay et grâce à une pub de fer je ne suis jamais seule pour les rencontres-tipi.
On commence à avoir besoin de lumière, le soir, pour arriver à chanter. Mais pas encore de chauffage : quel été fantastique ! (« Quel bol ! », je disais à Mathod à une journaliste qui me corrige « Quel cadeau ! »)
Samedi matin à 7.30, Olivier Poletti qui a fait imprimer les cartes postales d’Evangile en chemin (à un prix particulièrement avantageux) vient me souhaiter le bonjour avec des croissants, on prend le café ensemble. Ces deux jours, il y a pas mal de va-et-vient car je suis au centre du quartier, les gens entendent Speedy braire et viennent le voir. De plus, je rencontre des personnes en sortant Barou ; par exemple Patricia, qui sort également son chien Rocky et que j’invite. Elle vient souvent, ce week-end, et ensuite aussi à Grandson.
Je suis contente, samedi soir, d’être invitée à souper chez Jacques Wenger, collègue diacre de rue à Yverdon, qui en plus, nous amène du café à mes visiteurs et moi lorsque je n’ai pas le temps de le préparer !Dimanche matin une dame passe, je l’invite pour un café, elle me dit : « Mais je ne veux pas vous déranger ! » (Qu’est-ce que j’entends ça souvent !) « Mais vous ne dérangez pas, au contraire ! » – « Mais vous n’êtes quand même pas là pour boire des cafés avec des parfaits inconnus ! » – « Si Madame, c’est exactement pour ça que je suis là : pour boire des cafés avec des parfaits inconnus ! » Alors elle reste presque une heure, elle qui semblait si pressée, et on discute.
Ce dimanche matin : le pasteur a changé l’heure du culte pour permettre aux paroissiens de venir à la rencontre-tipi de 9h30. Ensuite, c’est moi qui vais « chez lui » au culte ; j’ai pris ma vielle roue avec moi et j’apporte le message autour de la prière de Nicolas de Flüe. Cette prière devient toujours plus clairement l’expression de l’Evangile pour moi, et donc aussi de cet &l
aquo; Evangile en chemin » : qui débute par « Mon Seigneur et mon Dieu », les paroles de Thomas, d’un être humain bouleversé par la réalité d’un Jésus qu’il croyait si définitivement mort et qui se trouve face à lui, si incroyablement vivant… « … Enlève-moi, donne-moi » – des paroles qui indiquent un chemin, un temps pour grandir… et qui montrent qu’il s’agit d’un chemin à deux, où le Christ prend l’initiative et où l’être humain suit, et non pas l’inverse que nous pratiquons si souvent !
Dimanche soir, 38 personnes et un chien arrivent à se coincer dans le tipi, record absolu !
Dehors, il reste quatre personnes ce qui permet de garder le contact avec ceux qui passent. Nous partageons autour des noms de Dieu : qu’est-ce que cela veut dire pour Dieu d’être notre Père ? Notre berger ? Notre lumière ? On a tendance à partir toujours de la question ce que cela veut dire pour nous, mais mettons les priorités justes : c’est Lui qui a choisi de s’appeler ainsi, de se révéler ainsi, alors qu’est-ce que cela implique pour lui ? Ensuite peut venir la question de ce que cela signifie pour nous, et alors aussi concrètement, dans la semaine qui suit.
Durant ce voyage à travers le canton, ce choix de mettre Dieu au centre, cette priorité devient de plus en plus importante pour moi. Au cours des nombreuses discussions, je me rends toujours d’avantage compte à quel point les gens accordent une grande importance à leurs émotions, leurs expériences. Cette redécouverte est légitime et belle dans un sens, mais je crois que c’est aussi une réaction à l’époque où il n’y avait pas assez de place pour l’émotion, l’expérience. Maintenant, il me semble que c’est parfois le contraire : Dieu devient presque l’équivalent de l’expérience ; c’est l’émotion qui est au centre et qui détermine tout. Alors c’est la roue de Nicolas tournée à l’envers : avec nous au centre et Dieu que nous faisons tourner autour de nous !
Ce qui a des conséquences assez désastreuses :
Pas d’expérience – pas de Dieu ! Si je ne le sens pas, cela veut dire qu’il n’est pas là.
Et cela veut dire aussi : si je ne sens pas son Amour, c’est qu’il ne m’aime pas.
Et cela veut dire, sûrement, que je ne suis pas digne de son Amour, ou que j’ai fait tout faux, et qu’ il me punit…
Cercle vicieux que j’essaye de repérer et de démasquer, car c’est une pente glissante. Dieu n’est pas le produit de nos idées, de nos pensées, même les meilleures, ni de nos émotions. Il est là, présent, vivant, agissant, aussi indépendamment de nous, aussi si nous ne croyons pas, aussi si nous ne sentons absolument rien ou même le contraire.
Ce dimanche soir, j’hésite à donner une bénédiction personnelle : ça va prendre du temps ; est-ce que les gens vont supporter ? Etant si inconfortablement assis sur le sol, avec juste quelques chaises pour ceux qui en ont besoin ? !
Mais il me semble que Dieu dit que je peux y aller, et alors cela dure un certain moment, et alors cela ne semble pas gêner du tout ceux qui sont là. Les gens disent un nom de Dieu qui est important pour eux, et j’inclus ce nom dans la bénédiction. Robert me bénit, moi, avec le nom de Dieu qui j’ai choisi : mon roc.
C’est toujours un moment très fort, ces bénédictions dans l
a dynamique du va-et-vient entre Dieu et son collaborateur l’humain, relaté en Nombres 6, 22-27, où Dieu dit : « Vous allez bénir les gens, en leur disant ces paroles qui viennent de moi, et moi, Dieu, je vais réaliser ces paroles ! »
Pour la enième fois, on n’arrive pas à faire démarrer le tracteur, donc c’est avec les mains et les pieds qu’on amène la roulotte et l’âne chez Madame Gagnaux, qui en prendra bien soin !