Impressions, fin d’hiver


Bien sûr, j’aurais dû écrire cela plus tôt… les wagons du LEB à la gare d’Echallens semblent déjà si loin… Mais c’est une chance aussi, de pouvoir revenir un moment en arrière, regarder ce qui est resté dans ma mémoire, et pourquoi. Ce sont donc, comme la dernière fois, des bribes et des traces que je vous offre, plutôt que des nouvelles !

Un souvenir important : les groupes de jeunes qui sont venus, d’Echallens, de Savigny. Avec leurs questions, l’expression de leur difficulté de croire – dans un monde qui ne les aide pas – avec des parents qui les envoient au KT mais ne peuvent pas les soutenir dans leurs recherches, parce que la Réalité de Dieu leur est devenue étrangère, lointaine – dans une Eglise où ils peinent à trouver leurs repères.

Quand leur pasteur, François Rochat, leur parle de la bénédiction personnelle que j’aime donner à ceux qui viennent et le souhaitent, je me dis que ces catéchumènes ne vont jamais accepter – comment ça ?! Devant les autres, et par une drôle de pasteur dans un train ?!

Et quand même, à part une exception tous acceptent. -Après l’un d’eux vient vers moi : « Vous savez avant ce que vous allez dire? Vous avez un répertoire fixe ou vous dites vraiment quelque chose d’unique pour chacun ? Et vous faites comment pour trouver? » -Quand j’explique que j’essaye d’écouter Dieu, et d’être un peu un canal, mais que je peux me tromper parce que je suis et je reste moi-même et donc fragile, il part tout pensif.

Un autre moment fort pour moi : la fondue bourguignonne avec 5 membres du Conseil Synodal et des époux. Chouette de simplement bien manger, de partager, de rire… et de parler de l’Eglise, les belles choses qui se passent. Mais je peux dire aussi cette impression que j’ai qu’elle est malade, notre Eglise, et qu’elle a besoin de soins… On peut vivre de belles choses tout en étant malade, et mieux vaut chercher également comment guérir. Je n’ai pas de recettes, bien sûr, juste une intuition qu’il faudrait carrément un temps d’arrêt total de toute activité, pour pouvoir – ensemble – demander au Christ son désir pour son Eglise.

D’autres fondues me viennent à la tête : celle avec un employé du LEB, celle avec le directeur du LEB et son épouse, celle avec l’ancien directeur, son épouse, et les gens chez qui Speedy avait logé pendant l’été, celle avec les jeunes d’Echallens et leurs aumôniers, Jean-Marc et Sylvie… autant de moments dont je me souviens si bien, peut-être parce qu’on a le temps pour discuter quand on mange ensemble…

Les offices me reviennent : la force des textes des trois rencontres : celui, basé sur une liturgie orthodoxe copte, du matin, qui donne une vraie colonne vertébrale à ceux qui la lisent plusieurs fois – ce qui fait que je le recommande à tous ceux qui se sentent parfois perdus, dans leur vie comme dans leur foi (donc d’abord à moi-même !) – celui de 13.00, où nous prions pour ceux qui l’ont demandé – et celui du soir, le moment de partage, où j’ai appris mille choses des autres participants.

Et les discussions à partir de ces textes restent très présentes pour moi aussi : des gens qui viennent chercher des repères, qui reviennent en disant qu’ils les ont un bout trouvés… quelqu’un qui me dit que c’était peut-être la première fois dans sa vie qu’elle a lu un texte d’église qui ne lui donne pas le sentiment d’être exclue (si beau mais aussi surprenant, étant donné la densité et le caractère confessionnel de ces textes !) … des gens d’accord d’apprendre, d’avancer, de mettre en question. Et qui choisissent en tout cas de ne pas rester indifférents ou en rade.

Les questions difficiles resurgissent, maintenant que je repense à tout cet hiver : comment aider quelqu’un qui est tombé dans le piège de l’occultisme, qui se rend lentement compte et qui veut en sortir mais ne sait pas comment ? – Nous, les pasteurs réformés, on n’est pas tellement formés pour ce genre de choses ! Pas du tout même. Mais on ne peut pas renvoyer quelqu’un qui souffre les mains et le cœur vides. Que faire alors ?

Les textes du matin se sont avérés une grande aide. Comme me disait le moine du désert en Egypte, qui m’accompagnait durant une semaine : « Ici les gens des villages venaient souvent chez les moines pour qu’ils chassent les mauvais esprits. Les moines n’étaient pas très enthousiasmés, car même si les esprits devaient partir, les gens, eux, n’avaient rien appris. Alors ils leur proposaient plutôt d’être équipés eux-mêmes : de lire les psaumes et d’autres textes bibliques, inspirés par le Saint-Esprit – de confesser qui est Dieu et qui est Jésus-Christ – de se positionner clairement, à travers les textes liturgiques, la prière et la louange, dans les promesses de l’Evangile – de choisir d’appartenir à Jésus-Christ seul, et ainsi de devenir de plus en plus libres. Ainsi, les gens pouvaient devenir eux-mêmes plus forts, et résister eux-mêmes au mal bien réel qui les guettait.

Alors, maintenant, chaque fois qu’une personne vient avec ce genre de souffrance, je lui propose de suivre ce chemin, qui me semble sain, et en plus approprié pour toute personne, qu’elle ait des problèmes ou pas.

Voilà un bref résumé de l’hiver 2011 ; quelques souvenirs d’un temps si intense, pas confortable (physiquement, psychiquement et spirituellement) mais qui a permis de rencontrer beaucoup de personnes, et qui a permis à quelques-unes de ces personnes de grandir. D’abord à moi !

Hetty Overeem